La douleur des anges

Je vous mets la nouvelle que j'ai envoyé au concours du jeune écrivains. Soyez indulgent s'il vous plait, c'était la première fois que j'était confronté au contraintes de la nouvelle et j'était limité dans le temps. Il n'empèche que je suis devenus acro car je suis en train d'en écrire une autre en même temp que mon roman, ça me permet de m'entrainer et d'amélioré mon style. Bon, bonne lecture.

La Douleur des Anges

Le créateur, l’innommable, le Seigneur et bien d’autres noms encore, pour la plupart faux. Pourquoi faux ? Prenons ceux que je viens de citer : quelqu’un qui ne peut être nommé, si on lui donne le nom d’innommable, est tout de même nommé. Le créateur. Créateur de quoi ? Il a été prouvé que nous descendons de molécules suite à l’évolution des espèces. Le seul responsable de la création est le destin, l’implacable destin, le cruel destin qui s’amuse d’êtres et de choses selon son bon plaisir. La création de l’univers, la vie, le choix que l’on va prendre, tout cela est régi par le destin. Nous croyons pouvoir lui échapper, mais ainsi faisant, nous allons encore plus droit sur le chemin qu’il nous a tracé. Mais alors, quelle est la fonction de ce Seigneur tant vénéré ? Et pourquoi pas tout simplement protéger la vie avec l’aide de ses anges ?
Voilà le sujet qui va nous intéresser : les anges. Ces être ailés à la pureté immaculée, ces messagers de paix, d’amour et de sagesse. Mais est-ce bien là leur vraie nature ? Si c’était le cas, pourquoi certains d’entre eux sont passés du côté sombre ? Nous verrons cela ultérieurement, mais sachez que rien n’est blanc et rien n’est noir : tout est fait d’une multitude de nuances de gris. Les anges peuvent paraître blancs, mais sont en réalité d’un gris très clair. Cette infime partie de noir au milieu de blanc peut devenir une infime partie de blanc au milieu de noir. Il suffit pour cela qu’un événement la nourrisse de haine, de rancune, d’intolérance pour qu’elle grandisse et prenne le dessus sur le blanc. Mais revenons à nos anges. Il y a 72 anges gardiens et autant d’anges déchus. Les anges sont répartis selon neuf chœurs ; chaque chœur ayant une position hiérarchique précise et étant dirigé par un archange-recteur. Le plus bas grade angélique est le chœur des anges dirigé par Gabriel, vient ensuite le chœur des principautés et le chœur des archanges, respectivement dirigés par Haniel et Mikaël. On trouve ensuite le chœur des vertus dirigé par Raphaël. Puis il y a les puissances, dirigées par Camaël, qui sont au même niveau que les dominations, dirigées par Tsadriel. Viennent ensuite le chœur des chérubins et le chœur des trônes, dirigés dans cet ordre par Raziel et Tsaphriel. Enfin, le chœur des séraphins, dirigé par le prince Métatron. Nous avons trois anges gardiens : un ange gardien physique, un ange gardien mental et un ange gardien spirituel. Nos anges gardiens veillent sur nous aux moments importants de notre vie. Important à leur sens, et non au notre : ils ne veilleront pas sur nous à l’occasion d’un examen, mis à part si l’obtention ou l’échec de ce dernier nous met en un grave danger. Ils veillent sur nous, mais personne ne peut les voir. Personne à part une jeune adolescente du nom d’Edelweiss. Un nom ma foi bien particulier, mais correspondant fortement à cette jeune fille. Cette fleur belle et rare, d’aspect petite, fragile et douce, pouvant être considérée comme un symbole de pureté du fait de sa blancheur. Elle pousse en haute altitude, unique fleur au milieu de la neige et de la glace, ce qui ne fait que la rendre plus précieuse encore. La jeune fille qui porte son nom arrive vers ses seize ans, ces seize ans qui se montreront décisifs pour elle.

« Un exposé sur les trois religions monothéistes. Voilà qui, dans mon cas, ne va pas être simple »
Edelweiss était à la bibliothèque de son lycée, seule à sa table. Comme d’habitude, personne n’avait osé s’asseoir à côté d’elle. Pourtant, on ne pouvait pas dire qu’elle était repoussante. Au contraire, elle était belle, très belle, trop peut-être. Certains disaient qu’elle était bénie depuis sa naissance, ou qu’elle était la réincarnation d’une grande dame du passé, d’autre encore prétendaient que sa beauté était maléfique, que c’était une sorcière, une démone… enfin bref, toutes les plus folles rumeurs circulaient sur elle, et seulement quelques-unes lui étaient parvenues pour tenter de la blesser, divulguées par certains prétentieux qui s’étaient certainement dit que cela impressionnerait qu’ils aient pour petite amie la plus belle fille du bahut. Belle, je le répète encore une fois, elle l’était certainement. Ses longs cheveux blonds bouclés semblaient faits de fils d’or. Son teint était clair, non pas blafard, plutôt blanc comme la neige qui vient de tomber, d’où le surnom de Blanche-Neige dont l’avaient affublée les petit comique du lycée, mais là encore, c’était par hasard qu’elle l’avait appris, car personne n’avait osé le lui dire en face. Tout cela à cause de ses yeux, ces yeux d’un bleu glacé. Ce regard dont on ne pouvait percer l’expression, mais qui plongeait au plus profond de vous-même, tant et si bien que vous aviez l’impression que vos plus intimes secrets, que vos rêves les plus cachés, vos souvenirs les plus refoulés, vos sentiments les plus dissimulés, que tout cela était mis à nu sans aucun effort. Des yeux pénétrants, un regard insoutenable.
Certes, de nombreux garçons en étaient amoureux, mais elle n’en avait cure. Quand on a le pouvoir de voir les anges, même le plus beau des mortels ne peut soutenir la comparaison, même le plus doux et le plus attentionné des hommes ne fait pas le poids, même le plus courageux et le plus brave parmi la gente masculine n’est qu’un gringalet.
« Je me demande bien pourquoi ? Nous pouvons t’aider Haniel, Gabriel et moi. »Celui qui venait de parler était l’ange gardien spirituel d’Edelweiss : Mikaël, l’archange-recteur du chœur des archanges. La jeune fille fixa son protecteur, l’un des rares à pouvoir soutenir son regard. Elle ne savait pas pourquoi, mais son affection pour cet ange était différente de celle qu’elle éprouvait à l’égard des deux autres. Peut-être était-ce dû au fait que Mikaël était le plus éloigné de l’idée que l’on se fait de l’apparence physique d’un ange. Bien entendu, il était d’une beauté qui était supérieure à celle des humains, mais ses cheveux qui descendaient presque jusqu’à ses genoux étaient d’un noir aussi profond que celui d’une nuit sans lune ni étoiles. Ses yeux d’un gris argenté semblaient mélancoliques et rêveurs. Son teint était légèrement halé, ce qui était étonnant chez quelqu’un dont les autres détails physiques faisaient surtout penser à la nuit.
Edelweiss savait qu’elle était la seule humaine à être constamment surveillée par un de ses trois anges. Elle savait aussi qu’elle était la seule humaine à avoir pour anges gardiens des archange-recteurs. Cela la rassurait d’avoir son don : depuis sa naissance, elle n’avait jamais été seule pendant plus de quelques secondes. Qui plus est, elle avait tissé avec ses trois anges de forts liens d’amitié.
Elle esquissa un sourire
« C’est bien cela qui m’inquiète, pensa-t-elle pour répondre à son protecteur. »
Elle savait que Mikaël connaissait chacune de ses pensées, comme les deux autres quand ils étaient là. C’était
ainsi qu’elle communiquait avec eux, tout en écartant les soupçons sur sa santé mentale si quelqu’un venait la
surprendre à parler dans le vide.
L’ange leva un sourcil pour signifier à sa protégée qu’il ne comprenait pas le pourquoi de cette remarque. La sonnerie retentit, et Edelweiss commença à ranger ses affaires. La dernière heure venait de s’achever, elle devait quitter le lycée. Elle avait fait tous ses devoirs mais elle n’avait pas pu commencer ses recherches pour cet exposé. Ce n’était pas grave, elle avait encore du temps devant elle avant de devoir le présenter à la classe.
« Tu sais très bien ce que cela a donné la dernière fois que vous avez tenté de m’aider pour un devoir, expliqua-t-elle d’un ton amusé. »
Mikaël battit des ailes, comme pour écarter l’allusion faite par Edelweiss. Mais cette dernière savait qu’il s’en souvenait parfaitement. C’était un jour où elle était tombée malade, elle n’avait pas pu faire un devoir qui était à rendre et n’était pas en état de réfléchir pour le faire. Comme d’habitude, elle avait caché sa maladie à ses parents : son père n’en aurait rien eu à faire et sa mère l’aurait forcée à rester au lit. Et ce que la jeune fille détestait le plus, c’était bien de rester la journée entière sans rien faire ni sortir. C’est pour ça qu’elle préférait consulter l’infirmière. Il n’empêchait que ses anges gardiens avaient tenté de l’aider, et qu’elle avait récolté l’une des plus mauvaises notes qu’elle n’ait jamais eues. Cela eut pour résultat que, pendant une semaine, Haniel s’était creusé la tête pour savoir sur quoi ils s’étaient trompés, Gabriel avait pesté contre ces humains qui ne savaient rien sur rien et qui prenaient le faux pour le vrai (c’est à ce moment qu’Edelweiss avait compris pourquoi le chœur des anges était le plus bas dans la hiérarchie des anges gardiens et qu’ils étaient les plus éloigné des humains), quant à Mikaël, il avait fallu à la jeune fille l’appeler sans relâche pour qu’il daigne réapparaître.
Ce n’est qu’a la sortie du lycée que l’archange-recteur répliqua :
« Mais au moins, sur ce sujet, nous sommes bien placés pour t’aider, il me semble ? »
Edelweiss regarda son ange d’un air attendri : il acceptait toujours aussi peu l’idée d’un échec.
« Ce n’est pas ton travail que de m’aider à faire mes exposés, déclara-t-elle d’un ton affectueux, mais toujours par pensée. Et puis, je suis assez grande pour le faire toute seule. Dois-je te rappeler que je vais avoir seize ans dans deux semaines ? »
Mikaël fixa sa protégée avec des yeux qui semblaient plus mélancoliques que d’habitude. Elle ne se doutait de rien. Elle ne savait pas que dans deux semaines, tout ce qu’elle avait connu aurait une toute autre dimension. Elle ne savait pas qu’un énorme changement allait survenir pour elle, si elle réussissait à rester en vie pendant encore deux semaines. Deux semaines au cours desquelles Gabriel, Haniel et lui allaient sans doute avoir beaucoup de travail pour parvenir à préserver leur protégée de tous les dangers qui allaient se présenter. A peine avait-il eu cette pensée que deux anges aux ailes noires apparut. Edelweiss se figea sur place et avant d’avoir compris qu’il s’agissait d’anges déchus, ces derniers s’étaient lancés à l’attaque. Elle aurait certainement été transpercée de part en part si son ange gardien présent n’avait pas réagi au quart de tour. Il avait retiré son épée de son fourreau et s’était interposé. Cette épée semblait faite de cristal, mais était aussi dure que translucide. Il était indéniable que Mikaël savait se battre (même si les anges étaient censés être un symbole de paix, mais passons), mais à deux contre un, il ne tarda pas à avoir le dessous. Edelweiss sentait chacun des coups qu’il prenait mais elle ne pouvait rien faire. Un instant ! Si ! Elle pouvait faire quelque chose.
« Haniel ! Gabriel ! »
Elle avait hurlé les noms de ses deux autres anges gardiens de toute la force de ses poumons, elle savait qu’ils l’entendraient. Et peu importe si les quelques habitants acariâtres de cette rue quasiment déserte regardèrent à leur fenêtre pour connaître l’identité de celle qui avait osé troubler leur quiétude. Les archanges-recteurs du chœur des anges et du chœur des principautés répondirent aussitôt à son l’appel. Quand ils comprirent ce qui se passait, ils entrèrent à leur tour dans la bataille et eurent ainsi tôt fait de repousser les agresseurs.
Une fois cela fait, Haniel se précipita sur sa protégée pour l’empêcher de parler.
« Tu n’es pas dans ton état normal du fait que l’un de tes anges ai été blessé près de toi. Alors il vaut mieux éviter que l’on ai des doutes sur ta santé mentale. Tu comprends ? »
Pendant ce temps, Gabriel prit le corps inerte de son ami dans ses bras.
« Je vais l’emmener là-haut pour le faire soigner. Je compte sur toi pour redoubler de vigilance. »
Haniel opina du chef pour signifier à son compagnon qu’il n’y avait pas d’inquiétude à avoir. Ce dernier prit son envol. L’ange gardien resté auprès d’Edelweiss constata que plusieurs curieux observaient la scène à travers les rideaux.
« Pour la discrétion, on repassera ! constata-t-il. Viens ! Il vaut mieux ne pas rester ici. »
La jeune fille le suivit sans opposer de résistance. Mikaël étant son ange gardien spirituel, l’âme de sa protégée était aussi blessée que lui. Elle se retrouvait maintenant amoindrie dans une période où les attaques ne faisaient que commencer.

« Tu t’es enfin réveillé ! Tu pourras te vanter de nous avoir fait peur ! Et surtout d’avoir pu roupiller pendant un bon moment ! »
Lorsque sa vue eut cessé de se brouiller, Mikaël put apercevoir que deux Gabriel le regardaient. Après tout, quel autre ange aurait pu parler de cette façon. Mais il s'assura tout de même que le fait de voir double était du à ses blessures. Un Gabriel, c’est déjà beaucoup, alors deux. Il réussit à faire le point. Les quatre yeux verts n’en formèrent plus que deux, les deux visages halés fusionnèrent, les longs cheveux roux se réunirent sur une seule tête.
« Combien de temps suis-je resté inconscient ? s’enquit l’archange-recteur du chœur des archanges
– Un mois dans notre temps, lui répondit l’archange-recteur du chœur des anges. Mais une demi-heure sur terre.
– Et Edelweiss ? demanda Mikaël
– Haniel veille sur elle, lui assura son interlocuteur.
– Tu ne crois pas qu’il vaudrait mieux veiller constamment sur elle ? déclara le blessé. Si les anges déchus sont passés à l’offensive, Haniel seul ne pourra pas les contenir.
– Et c’est pourquoi je suis venue vous parler, déclara une troisième personne. »
Gabriel se leva d’un bond pour s’incliner. Mikaël voulut faire de même mais ses blessures ne lui permirent pas de se relever de plus de quelques centimètres.
« Prince Métatron ! dit-il en guise de salut. Archange-recteurs du chœur des séraphins ! Le plus haut placé dans la hiérarchie des anges après notre seigneur. Je vous prie d’excuser l’état dans lequel vous me trouvez.
– Cela ne fait rien, répondit le prince des anges, vous ne vous y retrouvez pas de plein gré, et je ne saurais blâmer un être qui a subi la volonté du destin. Mais cela montre que nous avons relâché notre attention alors que l’instant se rapprochait de plus en plus. Il y aura sûrement d’autres tentatives des anges déchus pour corrompre Edelweiss afin de la récupérer le moment venu. Je me permets de vous rappeler que cette incarnation est notre dernière chance de la sauver, et, par la même occasion, de nous sauver. On ne peut se permettre qu’elle se réveille trop tôt, comme les fois précédentes, car ses chances de survie seraient minimes, voire nulles. »
Métatron s’arrêta, comme pris par ses pensés. Quand il releva la tête, se fut pour fixer Mikaël d’un regard aussi perçant que celui d’Edelweiss.
« Quant à vous, archange-recteur du chœur des archanges, reprit-il, je me permets de vous rappeler que si vous êtes mêlé à cette affaire malgré votre implication personnelle, et même plus que personnelle, c’est que notre seigneur à jugé que vous seriez un atout pour la garder à nos côtés. C’est pour cela que je vous prie d’être encore patient. »
Le seigneur des archanges regarda son interlocuteur d’un regard où se lisait une immense tristesse, mais il fit signe qu’il acceptait. Puis, oubliant tout respect, il se laissa retomber sur son lit et se mit à contempler le plafond. Gabriel allait en faire la remarque, mais le prince Métatron posa une main sur son épaule pour l’en empêcher et l’inviter à sortir de cette pièce à sa suite.
Lorsque les deux intrus furent parti, Mikaël laissa libre cours à sa tristesse et à son désespoir à travers ses larmes.

Edelweiss n’avait encore que peu de réactions. Haniel devait sans cesse veiller à ce qu’elle ne bouscule pas toutes les personnes qui passaient par-là, où encore qu’elle ne rentre pas dans le mur qui se trouvait face à elle. Cependant, elle retrouvait un peu plus ses esprits à chaque minute.
La maison était en vue, l’ange espérait que l’état de sa protégée n’inquiéterait pas trop la mère de cette dernière. Edelweiss rentra.
« Te voilà enfin ! s’exclama la mère. Où étais-tu ? Je m’inquiétais. Tu n’as pas l’air en forme. Ca ne va pas ? Il y a eu des problèmes au lycée ?
– Ce n’est pas ça, répondit la jeune fille. J’ai juste un peu mal à la tête. »
Elle se cogna contre une chaise.
« Assieds-toi sur le canapé, lui conseilla sa mère, je crois que ça vaut mieux. »
Edelweiss s’exécuta. C’est alors qu’elle remarqua qu’un des anges gardiens de sa mère était présent. Elle lança à Haniel un regard interrogateur.
« Il fait partie du chœur des dominations, l’informa l’ange. Il s’agit de l’ange Omaël. Je vais lui demander ce qu’il fait ici. »
La jeune fille regarda s’éloigner son ange gardien mental. Il était son ange le plus terre à terre, mais aussi le plus proche de l’idée que l’on se fait de l’apparence des anges. Il avait de longs cheveux blonds et bouclés. Il était pâle de peau et ses yeux avaient la couleur d’un ciel d’été. Ses traits étaient tellement fins et son corps était si bien proportionné qu’on pouvait le prendre pour une femme si on n’y regardait pas à deux fois. Mais une fois que l’on s’était rendu compte que s’était un homme, on ne pouvait qu’être impressionné par sa beauté.
Edelweiss remarqua qu’une sorte de fumée noire s’était formée derrière son ange gardien.
« Haniel ! s’écria-t-elle sans se soucier de la présence de sa mère. Haniel ! Derrière toi ! Attention ! »
Le seigneur des principautés réagit, mais trop tard. Le nuage commençait à l’avaler, sans qu’il ne puisse rien y faire. Omaël, quant à lui, semblait pétrifié. Edelweiss courut porter secours à son ange, mais elle ne put qu’effleurer la main que ce dernier tendait avant de disparaître dans les ténèbres.
« Haniel ! appela-t-elle. Haniel ! Haniel ! »
Elle était incapable de réfléchir, de penser. Elle ne pouvait que crier le nom de son ange gardien mental.

Mikaël était sur pied deux semaines après son réveil. Il était presque totalement guéri. Il se promenait dans les jardins du paradis en compagnie de Gabriel lorsqu’un appel retentit avec force dans le domaine des anges. C’était la voix d’Edelweiss, et elle appelait Haniel. Sauf que cette fois-ci, ce n’était pas seulement l’appelé qui entendait, c’étaient tous les anges. Il était évident que l’humaine était paniquée. L’archange-recteur du chœur des archanges et celui du chœur des anges prirent leur envol en même temps.
« Reste ici ! lui conseilla Gabriel. Tu n’es pas encore remis !
–Je peux aller porter secours à Edelweiss ! rétorqua Mikaël. Et puis, il est évident qu’il est arrivé quelque chose à Haniel. Nous ne pouvons plus prendre le risque d’être seul.
–Je sais que je n’arriverais pas a te faire changer d’avis. Alors fais comme tu voudras ! »
Ils s’élancèrent sur Terre aussi vite que possible.

« Qui êtes-vous ? »
Ce fut la phrase qu’Edelweiss prononça quand sa mère tenta de lui demander ce qui s’était passé. Ce fut à ce moment que Mikaël et Gabriel arrivèrent.
« Qui êtes-vous, vous aussi ? » interrogea leur protégée.
Les deux archanges-recteurs furent frappés de mutisme lorsqu’il entendirent cette phrase. Ce fut Omaël qui dut les ramener à la réalité.
« Son ange mental s’est fait aspirer par une sorte de trou noir. Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé. Mais depuis, Edelweiss a perdu la mémoire et semble incapable de réfléchir. »
Edelweiss les fixait d’un regard vide, ignorant sa mère qui lui hurlait d’avoir une réaction.
« Omaël ! interpella Gabriel. Je crois qu’il serait sage de calmée cette femme. »
L’ange du chœur des dominations s’exécuta. Mikaël s’agenouilla auprès d’Edelweiss et posa sa main sur le front de cette dernière. Le contact frais de son ange ramena quelque peu la jeune fille à la raison.
« Haniel s’est fait aspirer, dit-elle posément.
– Nous le savons, lui répondit Gabriel d’une voix douce. »
Omaël avait réussi à calmer la mère, mais cette dernière s’inquiétait toujours pour la santé de sa fille. Et cela n’était en rien arrangé par le fait que les réactions d’Edelweiss étaient encore limitées. Elle la regarda donc d’un air détacher.
« Viens ! réussit à articuler la mère. Tu va aller au lit ! Ça vaudra mieux. »
L’adolescente suivit docilement.
« Cela est un choc pour cette femme, constata Mikaël. Omaël ! Elle ne supportera pas ce qui doit se passer dans peu de temps. Il faudra que vous, ainsi que les deux autres anges gardiens ayant la charge de cette femme la prépariez à la mort de sa fille. Car quoi qu’il advienne, elle mourra lorsqu’elle aura atteint l’âge de seize ans. »

« Il est heureux que tu aies enfin retrouver la raison, déclara Gabriel. Il était d’ailleurs temps, tu auras seize ans demain. Je suppose que tu n’as aucune intention de fêter ton anniversaire, comme d’habitude.
– Je ne vois pas pourquoi je devrais le fêter, répondit Edelweiss d’un ton acerbe. Surtout depuis que Haniel a disparu. Je n’ai vraiment pas envie de m’amuser. En plus, aucun de vous n’est allé aux nouvelles. »
L’adolescente était partie s’isoler dans le parc de sa ville. Il n’y avait plus beaucoup de monde qui y allait en automne. Mais ses deux anges gardiens ne la lâchaient plus d’une semelle et redoublaient leurs sermons. Principalement sur la prudence, mais aussi sur bien d’autres sujets. Cela avait pour don d’énerver Edelweiss qui était d’une humeur massacrante depuis la disparition de Haniel.
« Nous t’avons déjà dit cent fois que tout était mis en œuvre pour le retrouver ! soupira Mikaël. Je veux bien admettre que tu t’inquiètes pour Haniel mais ce n’est pas une raison pour t’en prendre à nous. La colère empêche de voir les plus simples évidences.
–ET VOILA ! hurla la jeune fille. CA RECOMMENCE ! J’EN AI PLUS QU’ASSEZ DE VOS CONSEILS SUR MA CONDUITE ! VOUS VOULEZ QUE JE DEVIENNE FOLLE ? OU ALORS QUE JE DEVIENNE BONNE SOEUR ? JE SUIS HUMAINE AU CAS OU VOUS L’AURIEZ OUBLIE. J’AI LE DROIT DE M’INQUIETER OU DE ME METTRE EN COLERE ! ET SURTOUT APRES CE QUI EST ARRIVE IL Y A DEUX SEMAINES ! »
Elle tourna les talons et se dirigea vers le centre d’un bosquet où elle disparu au milieu des arbres.
« Elle est vraiment susceptible en ce moment, constata Gabriel. On a à peine une journée pour faire en sorte que ça change. Honnêtement, je crois que pour cette fois nous n’avons pas su comment la réconforter. Nous sommes trop nerveux et ne faisons pas correctement notre travail d’anges gardiens.

– Il y a de quoi être nerveux, rétorqua Mikaël. Les anges déchus et les démons n’ont rien tenté depuis l’enlèvement d’Haniel. Pourtant, si elle se retrouve sans anges gardiens, il est certains que le moment venu, elle ira du côté du mal. Cependant, si elle venait à mourir ou à connaître la vérité avant l’heure, la garder en vie sera très dur.
– Je ne suis pas sûre que “la garder en vie” soit le terme adéquat, ironisa Gabriel. D’une certaine façon, elle va mourir.
– Tu m’ennuies ! déclara Mikaël. Il vaut mieux la rattraper. »
Joignant le geste à la parole, il pénétra dans le bosquet, l’archange-recteur du chœur des anges sur ses talons. Edelweiss était à genoux et pleurait. A peine les deux anges l’eurent-ils rejoint qu’une centaine de démons apparurent accompagner d’un ange déchu au-dessus duquel Haniel flottait, enfermé dans un gigantesque cristal.
« Abbadon, l’Exterminateur ! s’écria Mikaël.
– Nous avons un problème, constata Gabriel. Nous en avons même plusieurs. Et des gros. »
A peine eurent-ils le temps sortir leurs épées qu’une horde de démons se lança à l’attaque. Curieusement, aucun ne s’en prenait à Edelweiss. Celle-ci put donc voir l’ange déchu prendre son épée et
s’apprêter à la planter dans le cœur de Mikaël.
« NON ! EDELWEISS ! » Tel fut le cri du seigneur des archanges quant il s’aperçut que sa protégée avait pris le coup qui lui était destiné en s’interposant entre Abbadon et lui.
Le cri de son ange parut lointain aux oreilles de la jeune fille. Tout ce qu’elle voyait, c’était le visage stupéfait de l’ange déchu, c’était le liquide rouge qui coulait abondamment sur la noire épée. Du sang. Son sang. Tout ce qu’elle entendait, c’était l’ultime souffle qu’elle rendait, et qui semblait durer une éternité. Tout ce qu’elle sentait, c’était le froid du métal qui traversait son corps de part en part, mais c’était surtout cette douleur atroce, qui s’intensifia lorsque son assassin involontaire retira son arme. Elle tomba. Sa bouche qui ne goûtait plus que le sang qui y remontait réussit à articuler un ultime mot : « Pardon ».
Les ténèbres voilèrent ses yeux, puis tout redevint normal. Elle était debout, et ses sens aux aguets. Edelweiss vit les attaquants se retirer. Elle vit Haniel se libérer. Mais surtout, elle vit la mine triste et désespérée de ses trois anges gardiens qui la regardaient, puis qui regardaient quelque chose qui se trouvait à ses pieds. Elle les imita et constata que ce quelque chose n’était autre qu’elle, ou plutôt son corps privé de vie. La teinte de son visage ne laissait aucun doute sur son décès, la seul touche de couleur venait de ses lèvres où le sang coulait. Ce sang qui s’échappait à flot de sa blessure béante, et qui rendait écarlate la terre qui se trouvait autour d’elle. Edelweiss contempla médusée le spectacle de sa mort. Un responsable de l’entretien du parc apparut, son cri tira la jeune fille de sa contemplation. Elle voulut se diriger vers l’un de ses anges gardiens, mais quelque chose la gêna. C’est alors qu’elle s’aperçut que des ailes traînaient derrière elle.
« Edelweiss ! commença Haniel. Nous allons tout t’expliquer. »
Expliquer ? Il n’y avait rien à expliquer ! Elle était morte sans l’être réellement ! Qui pouvait comprendre quelque chose à cela ? A moins que… Elle regarda successivement les visages désolés de Gabriel, Haniel et Mikaël. Désolés, mais pas surpris. Ils savaient ! Ils savaient qu’en fait, elle était un ange. Ils savaient que sa mort était synonyme de son réveil. Ils savaient, mais ils n’avaient rien dit. Edelweiss leur en voulait. Ils l’avaient trahie ! Ils lui avaient menti ! Eux ! Ses anges gardiens ! Ses amis ! Ses confidents ! Elle en avait assez. Elle ne voulait plus les voir. Elle ne voulait plus se trouver à cet endroit.
Elle disparut dans un jaillissement de lumière.
« Elle ne sait pas encore voler, mais elle sait se servir de ses pouvoirs, observa Gabriel.
– Mais pour combien de temps ? se lamenta Haniel. Il n’y avait plus que quelques heures avant qu’elle ait seize ans, plus que quelques heures avant qu’elle ne puisse se réveiller convenablement, plus que quelques heures avant qu’elle ait toutes ses chances de survie. Elle s’est réveiller trop tôt. Elle va…
–Mourir ? demanda Mikaël. Tu l’enterres un peu trop vite. Elle a quelques chances de survie, aussi minimes soient-elles. Il faut qu’elle accepte ce qui s’est passé avant de disparaître. Retournez au ciel, moi je vais la sauver. »
Sur ce, il déploya ses ailes et s’envola sans un regard pour ses compagnons désespérés. Il était le seul à pouvoir aider Edelweiss.

Cela faisait bientôt un quart d’heure que Mikaël était à la recherche d’Edelweiss. Il la retrouva finalement au bord d’un lac. Elle était à genoux, recroquevillée sur elle-même. Autour d’elle, on pouvait voir de nombreuses plumes blanches : elle avait tenté d’arracher ses ailes qui maintenant pendaient lamentablement à ses côtés. L’archange-recteur du chœur des archanges se posa près de celle qui avait été l’humaine dont il avait la charge.
« Elles sont cassées, n’est-ce pas ? demanda-t-il.
– Laisse-moi ! lança Edelweiss dans un murmure à peine audible.
– C’est toi qui les as cassées en tentant de les arracher, je me trompe ? continua Mikaël.
– Laisse-moi ! ordonna la jeune fille, un peu plus fort que la fois précédente.
– Tu n’acceptes pas ce que tu es réellement, pas vrai ? déclara le seigneur des archanges, ignorant les paroles de sa protégée.
– Laisse-moi ! cette fois encore, sa voie devint plus forte.
– Alors je vais te dire ce que tu es : tu es comme moi, tu es un ange.
– LAISSE-MOI ! »
Elle avait crié ces paroles. Elle pleurait en se balançant d’avant en arrière. Elle était perdue, déboussolée, et Mikaël le savait. Il s’assit à côté d’elle et la regarda pendant plusieurs minutes, sans rien dire, le temps qu’Edelweiss comprenne qu’il ne partirait pas. Il essaya de lui faire relever la tête, mais elle repoussa sa main. « Je vais t’expliquer pourquoi nous en sommes là. N’as-tu jamais remarqué qu’il n’y avait pas de femmes anges ? Tu as dû penser que c’était normal, et bien non, et tu en es la preuve. Tu ne t’es pas transformée en homme, que je sache. »
Edelweiss persista dans son silence, Mikaël décida alors de continuer, en espérant qu’elle l’écoute.
« Il y en avait avant, mais c’était il y a bien longtemps. On ne sait pas pourquoi, mais un matin, on les a toutes retrouvées mortes, elles avaient été tuées d’un coup de lame dans le cœur. Notre souffrance n’avait pas de nom, tant et si bien que cette tragédie fut nommée La douleur des anges. Le désespoir de certains se transforma en colère, un certain Lucifer rejeta la faute sur le Seigneur de tous les anges, et nombre d’entre nous le suivirent. Tu connais la suite de l’histoire, ces anges sont devenus des anges déchus, le cœur gouverné par la haine. »
Il s’interrompit, sa protégée n’avait toujours aucune réaction. Mikaël reprit son récit.
« J’avais une épouse que j’aimais plus que tout, elle est morte en même temps que les autres. Cependant, on a constaté qu’elle se réincarnait de temps à autre dans le corps d’humaines. Si elle survivait jusqu’à ses seize ans en ignorant qui elle était réellement, elle pouvait redevenir ce qu’elle était. Le problème est qu’elle est toujours morte de mort violente avant ses seize ans. Il y a peu, sa dernière incarnation est apparue, notre dernière chance de la sauver, et de nous sauver, car, contrairement à ce que l'on croit, les anges peuvent mourir. Même si cela n’arrive que peu, si nous ne pouvons pas remplacer les morts, nous sommes condamnés à lentement disparaître. Mon épouse est notre dernière chance. Son incarnation actuelle, comme toutes les précédentes, porte le nom qui était le sien. Un nom bien spécial, que ce soit pour les humains et pour les anges. Elle s’appelle Edelweiss. »
Le silence revint, Mikaël attendait une réaction. Dans cette absence de bruit le temps semblait devenir une éternité. C’est alors que la voie d’Edelweiss se fit entendre, à peine audible :
« Si j’ai bien compris, la seule raison pour laquelle vous me portez un quelconque intérêt, c’est celle que je peut faire des enfants.
– Non ! lui répondit Mikaël. Tu es pour nous un espoir, et nous ne te forçons à rien.
– Tu as dit qu’il fallait que je me réveille à seize ans, et pas avant, fit remarquer la jeune ange. Pourquoi ?
– Si tu te réveilles avant tes seize ans, comme cela vient de se passer, lui expliqua l’archange-recteur, tes chances de survie sous forme angélique sont faibles. Normalement, à tes seize ans, ton esprit se serait souvenu de tes vies antérieures, et tu serais passée d’humaine à ange sans aucune difficulté. Tu aurais seulement quitté ton corps. Mais même si tu t’es réveillée avant, tu as des chances de survie, minimes, mais tu en as. Et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour que tu restes parmi nous.
– Pourquoi ? demanda Edelweiss. Pourquoi ne me laisses-tu pas ? Pourquoi ne fais-tu pas comme Haniel et Gabriel ? Pourquoi ne te résignes-tu pas ? »
Avant qu’elle ait eu le temps de le repousser, Mikaël la prit dans ses bras. A la grande surprise d’Edelweiss, son contact n’était pas frais, comme d’habitude, mais il dégageait une douce chaleur qui apaisa le cœur de la jeune ange.
« Tu ne m’as pas bien écouté, lui dit-il. Tu n’as pas entendu que je tenais à toi plus que tout. Je t’aime, Edelweiss. Je t’aime. »
C’est alors que la jeune fille comprit pourquoi ses sentiments pour cet ange étaient différents de ceux qu’elle ressentait pour les autres. C’était un sentiment bien plus profond, bien plus fort. C’était un souvenir d’un lointain passé qui se réveillait maintenant. Une raison pour continuer à vivre.

Voilà, j'attend vos critiques. Soyez franc SVP

waaa !! faut avoir des idées pour ecrire autant !! c'est long a lire, mais c'est genial !!!!

Merci ^^.
Je vous mettrait "Destins ou Chaos?" quant je l'aurais finis.

Un peu après la rentrée je vous mettrais les deux premiers chapitre de mon roman.