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 Haskaros - partie "Nouvelles et contes"

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Anassete
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Anassete


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MessageSujet: Haskaros - partie "Nouvelles et contes"   Haskaros - partie "Nouvelles et contes" EmptyJeu 10 Sep - 15:23

Avertissements :
- J'ai plusieurs copies de sauvegarde du texte. j'espère que celle-ci est la bonne (au niveau de l'orthographe).
- Ce texte a été écrit en 2006.

Titre : Phletamos [ larme de la fleur ]

« Vastes plaines verdoyantes, que les pleurs du ciel soulagent et que les sources aquatiques nourrissent. Arbres centenaires, habités par la joie, la paix et la sagesse, témoins de la Naissance et de la Mort. Pousses si jeunes et si frêles, se tenant fières et recherchant une lumière douce et chaleureuse. Délicieux parfums de fleurs exotiques ou de prairie.
Vent si doux et tiède dans les clairières un jour d’été, si violent et sec dans les montagnes un jour d’hiver. Souffle emportant rires, pleurs, paroles, cris, rêves et cruauté vers les cieux. Haleine de la terre en friche ou séchée. Tempête phénoménale des mers ou brise si rare.
Feu attisé par la chaleur de la journée, venant du cœur de la terre pour détruire tout sur son passage. Savoureuse chaleur des grands froids, qui égaie et nourrit. Guide des âmes égarées dans l’obscurité ou alliée de la mort.
Ruisseaux et sources si juvéniles et torrents si vifs, qui rafraîchissent n’importe quel pèlerin ou passant. Fleuve qui s’écoule comme le temps pour emporter toutes les âmes tourmentées vers le Grand Océan. Purification aquatique qui guérit de tous les maux. Abysses engloutissant tout ou cure bénéfique.
Terre qui nous a rejetés, monde utopique qui ne nous a pas acceptés, entends nos voix. Tant que notre exil durera, jamais de repos tu n’auras. Par tes éléments tu souffriras, et par tes créations tu mourras. »
Ces paroles ont été prononcées le jour où les Bannis s’en allèrent vers les cieux. Ce jour là, des perles cristallisées tombèrent de là haut sur le Monde, envahi par divers espèces qui n’acceptaient plus leur différence. C’est ainsi que de leurs grandes ailes blanches et pures, ou sombres comme la nuit leur permirent pour la première fois de leur existence de s’évader. Ceux qui avaient fait tout leur malheur, ce qui avait suscité la médisance, la discrimination, et le déshonneur les emportèrent haut dans la voûte céleste.
Les gouttes de glace devinrent eau au contact des plumes, s’écoulant rapidement et scintillant. Sur Terre, leurs Juges furent punis et les couteaux glacials tranchèrent tout ce qu’ils trouvèrent comme obstacles. Les débris volaient, éclaboussaient le paysage si doux et précieux à l’extérieur, pour mieux frapper dans l’intérieur noir et abusif.
Ce jour-là, les créatures ailées devinrent de minuscules et multiples sources de lumière dans le ciel noirci et grondant. Un chant rempli de peine les appela et les guida à travers les rayons de l’astre de feu, qui régnait en maître absolu sur les nuages. Ces boules cotonneuses luisaient, et changeaient de couleurs. On y apercevait du jaune, de l’orangé, du rose, du bleu, du blanc ainsi que d’autres mélanges. L’aurore accompagnait l’envol des Exilés vers la source de leur complainte. Cette mélancolie envoûtait leur âme, les dévorait d’un doux et monotone son. Plus ils s’approchaient, plus la voix se fit claire et apaisante. Un cadeau inestimable les attendait. Un songe, une utopie que personne ne pensait concevoir. Car, derrière les filets blancs et multicolores, se cachait une ville.
Un rêve ? Non. Une citée verdoyante et presque vierge leur tendait les bras. Elle était légèrement penchée, et se divisait cinq parties plus ou moins distinctes.
Au centre, la voix résonnait davantage. C’est là que tous se retrouvèrent, et remercièrent la créatrice de ce monde. Car oui, c’était une femme. Contrairement aux autres, ses ailes avaient disparu, ses cheveux lisses étaient très blancs et ses yeux gris. Toute son énergie, sa vie servait à ce nouveau monde dissimulé dans les hauteurs, inaccessibles aux créatures terriennes. La jeune femme était vêtue d’une simple tunique grise et déclara à ses congénères que ce monde serait leur, tant que tous s’entendront. De sa grande taille, elle laissa échapper quelques mots avant de retourner dans son sanctuaire : « Mimo nemios eguiist Smasophile. Mesis seria veleta Ethoselea. Eguii ia kaphileta. Keoinist ito hantose tumues phetes. »

La traduction littérale donnerait :
Je suis la Sagesse de l’émeraude. J’appelle cette ville l’Astre divin. Je suis la gardienne. Que le vent cultive vos âmes et vos esprits.
Tandis que la traduction donnée par les humains est :
Mon nom est Smapha. J’appelle cette ville Ethoselea. J’en suis la gardienne, et souhaite que le vent cultive votre esprit.

Ces créatures ailées, ces Bannis proposèrent leurs services à leur nouvelle Déesse. Seulement quatre seront retenus, et ainsi commença la nouvelle ère de cette assemblée d’Anges.

***************************

Vent, feu, terre, eau protégeront la Déesse des attaques qui lui seront portées : qu’elles soient naturelles, artificielles, puissantes, faibles, violentes ou pacifistes. La garde supérieure de Smapha sera toujours auprès d’elle, fixant chaque détail de son entourage, vivant pour son salut.
Les jeunes Elus de cette époque se nommaient Kanthouse, Kanouse, Kerrouse et Setonouse [1]. Les plus grands mages de leur élément. Jamais ils ne pourront avoir une vie, jamais ils n’auront l’occasion de s’éteindre lentement, car leur existence est vouée à une Déesse et ils leur aient interdit de se laisser emporter par la fatigue et la tentative de suicide. En effet, ces Anges là sont particuliers : ils vivent tant que leur mana [2] n’est pas écoulé, autant dire jamais s’ils ne sont pas le Dieu ou la Déesse. La mort ne survient donc que lorsque leur propre arme ne transperce leur corps. Le génie obscur ne laisse aucun sursis et dévore l’âme dès le contact. Une illusion de vie et un impossible repos éternel : voilà leur destinée.

« Un léger tintement se fait entendre. Des cloches ? Des grelots ? Celui-ci se fait de plus en plus proche et agressif. Il arrive, il avance. Non, il passe de l’autre côté, il ne viendra donc pas à la maison. Il ne me dérobera pas ma sœur. Comme je suis heureuse. Ce n’est pas encore elle qu’on appellera. Elle ne sera pas encore envoyée en guerre. Cette bataille immonde, cette boucherie qui inonde les plaines du monde souillé. Ravageant les dernières beautés que ce pauvre monde avait encore en lui, elle hurle toute la haine qu’ils éprouvent tous les uns pour les autres. Baignant les âmes de cette teinte rouge qui réveille violence, atrocités et mort.
Les Traîtres restés sur Terre viennent en aide à ces monstres qui nous rejettent. Et je sais que notre pseudo monarque en fait partie. Parce qu’il veut envoyer ma sœur là-bas. Grande sœur, promets-moi que tu ne partiras pas là-bas. Dis-moi que tu resteras toujours ici, à mes côtés, veillant sur notre cité enveloppé d’un voile cotonneux. Ce manteau qui, chaque jour passant s’épaissit.

J’ai peur. Si je hais tant ces gens, c’est parce que j’ai peur toute seule. Il n’y a personne qui vient me voir sauf tes quatre gardes. Même toi, tu ne souris. Tu ne ris plus. Tu ne pleures plus. Tu ne parles plus. Tu ne bouges plus. Tu ne vis plus. Assise sur ta grande chaise de bois sculptée, au milieu de ce cercle magique, tu pries et les autres n’existent plus.
Je ne sais même pas pourquoi je tiens tant à toi ! Ton affection est nulle, ta présence inexistante, ton regard imaginaire. Tu es pourtant ma seule famille, le seul cœur qui devrait pouvoir me comprendre. Alors pourquoi ne m’as-tu pas donné tout ce qu’une enfant demande ? De l’amour. Tu aurais pu au moins m’adresser la parole, que j’entende ta voix dont tes Ousa [3] parlent. Partager des souvenirs avec un être cher, ressentir sa chaleur qui vous enveloppe et vous défend. Non … … Je n’ai pas connu cela. On dirait que les Anges sont voués à faire perdurer une espèce, sans rien ressentir si ce n’est de la haine envers ceux qui les ont discriminés.
Est-ce donc cela ta vision de paix ? Penses-tu comme cet abruti de monarque ? Ton esprit serait-il hanté par la vengeance et le besoin de faire un génocide ? Crois-tu qu’ainsi tu arrêteras cette ségrégation ? La haine enfante la haine. C’est un cercle vicieux où peu de gens en sorte. On réussit grâce à son entourage, son environnement. Voilà ma sœur ta plus grande erreur. Tu ne les as pas laissés t’approcher. Tous ces êtres angéliques qui vivent dans cet endroit retiré croient tous en toi. Tu as rejeté leur admiration, et tu as préféré jouer les ermites. Comment peux-tu vivre comme cela ? Moi-même, je ne comprends pas pourquoi je suis encore ici, alors que je ne ressens rien. Je ne sais même pas ce qu’est un sentiment. Je suis encore une enfant égarée, élevée difficilement pour assurer ta succession. Lumière, feu, eau, terre, vent et tous les autres éléments secondaires, oui je les détiens. Et je maudis mon existence, car je ne respire que dans un seul but : prendre la place de ma sœur.

Le carillon revient. Il se dirige par ici. Non … non … non ! S’il vous plaît ! Ne l’emmenez pas ! Laissez la vivre ! Elle n’a rien fait pour avoir un tel destin. Pourquoi ? Pourquoi ? … De l’eau ? Qu’est-ce que c’est ? Elle coule le long de mes joues … Elle vient de mes yeux ? Comment ? Qu’est-ce ? … Est-ce cela des larmes ? Et cette douleur au cœur ? D’où vient-elle ? Peut-on a soigner comme toutes les autres blessures ? Je ne comprends pas. J’ai peur. Je ne veux pas que Smapha s’en aille loin de moi, loin de cette ville. Je ne veux pas aller à sa place !
Oui, j’ai compris maintenant pourquoi j’ai si peur ! Je ne souhaite pas avoir la même route que ma sœur. Je veux vivre comme je l’entends. Je veux pouvoir rire et pleurer, chanter, aimer et voir des gens. J’envie ces faibles créatures humaines. Leur vie est courte mais remplie d’émotions aussi bien négatives que bonnes. Mais est-ce cela qui les pousse à devenir abjectes, répugnants, monstrueux ?
Ma sœur … … Ma sœur … Ces larmes ne veulent plus s’arrêter. Ma vision se trouble de plus en plus. Ce bruit de grelot, c’est en fait le chant de la Mort. N’y vas pas ! Ne me laisse pas seule dans ce monde vide ! J’irai à ta place si tu me fais découvrir ta vie ! Celle à laquelle que tu as goûté il y a mille ans. Je veux que tu renaisses, que tes yeux pétillent de joie, que ta voix porte au-delà des nuages qui nous entourent. Tu dois vivre, et tu ne dois pas me laisser. Ce voile devenant presque opaque autour de nous m’apeure. C’est un signe de destruction qu’on me dit. Smapha, dis-moi que c’est à cause de la guerre, que ce n’est pas ton corps qui se vide de tout.

Cette mélodie de la Mort m’est plus qu’insupportable. J’ai l’impression de lire le futur à l’intérieur. Mon ventre porte un gros poids et mon cœur m’alourdit encore plus. La souffrance … Je l’ai toujours endurée. Je veux fuir et me faire toute petite dans cette pièce noire. Même si je suis capable de manipuler tous les éléments, je ne suis rien d’autre qu’une lâche et un Ange à qui il manque l’univers de l’enfance pour qu’il puisse évoluer. J’ai grandi trop vite. On ne peut pas retourner en arrière.

Le tintement s’éloigne de nous à présent. Il se dirige vers ton sanctuaire où tu te donneras corps et âme. Je ne peux pas te laisser faire. Je t’en empêcherais ! Qu’importe si on me retire mon grade, tant pis si je suis bannie de cette ville. J’aurai fait quelque chose parce que je t’aime ma grande sœur. Aimer … … Un autre sentiment que je crois maintenant connaître, mais qui file entre mes doigts. »

Notes :
[1] Autrement dit Shantoussé [sha-n-touss-é], Canussa, Kerouss et Setone [sé-to-n].
[2] Energie vitale. Aucune allusion à quelque jeu qui soit.
[3] Ousa : Anges représentant de leur élément durant l’existence Smapha, puis seront pris comme des Anges nobles ou Archanges sous Célélathane.

***************************

« Déesse, votre sœur est là. Elle demande à vous voir. »
Kerrouse, Ousa masculin de la terre venait d’entrer dans la pièce la plus retirée du sanctuaire. Les murs étaient d’un beige terne, et le peu de luminosité laissait transparaître quelques ornements couleur or. Les fresques représentaient les étapes de l’Exil. On voyait bien que le travail était très minutieux et reflétait une certaine tristesse. Sur le sol en dalles se dessinaient plusieurs lignes venant de plusieurs endroits, mais se rejoignant dans un même endroit. Quelques cercles les ornaient plus ou moins. Mais arrivé à l’origine de toutes ses droites jaune passé, un cercle plus oeuvré que les autres. Les couleurs foncées formaient des symboles étranges, relevant sûrement de la magie blanche. Placés sur les extrémités de cette forme ronde, trois autres Ousa se tenaient debout, et observait leur confrère qui venait d’entrer. Leur regard se posait devant lui ces envoyés du monarque d’Ethoselea [1]. Tous l’allure sérieuse et avec une aura de violence. Leur sang bouillonnait rien qu’à l’idée de savoir qu’ils iraient bientôt rejoindre les leur dans le Monde d’en bas pour exterminer ses monstres qui les ont chassés.
Smapha pour la première fois depuis de nombreux siècles réagit aux paroles qui lui sont prononcées par des mots et des gestes. Elle se leva et fit d’une voix dure : « Qu’elle entre. Qu’elle connaisse enfin le poids de sa destinée. »

La sœur, encore sous des traits enfantins, de petite taille et dont les cheveux vert pastel raides retombaient sur les épaules entra. Elle était habillée d’une simple tunique blanche, au col bateau décoré de petites pierres et de courbes s’entrechoquant. Elle vint se poster devant la Déesse, le visage encore rosé par les pleurs qu’elle a versé. Pour la première fois, elle a pu l’approcher, l’observer de près et l’admirer. Ses yeux bleu clair et fins virent une femme de taille moyenne, les cheveux blancs et raides allant jusqu’au bas du dos, portant une tunique bleu pâle et une ceinture vert foncé. Son sceptre était grand, couleur or, finissait en haut par deux branches s’entortillant, et était incrusté d’émeraudes sur tout le long.
Un trou dans le plafond grisâtre laissait passer un grand rayon de soleil. Celui-ci enveloppait uniquement le corps de la Déesse imposante par sa splendeur.
La cadette se serait émerveillée, si seulement Smapha ne lui avait pas lancé : « Te voilà enfin ! Sais-tu depuis combien de temps j’attendais que tu portes ce fardeau à ma place ? Sais-tu à quel point je me sens libérée, et que je suis heureuse que tu souffres à ma place ? »
Après un court silence, sa sœur osa émettre un son : « Je … ne … comprends pas, souffla-t-elle encore sous le choc des paroles.
- Tu ne comprends pas, dis-tu ? s’exclama alors la Déesse. Te souviens-tu que ce n’était pas à moi de donner ma vie à cette abominable ville ? Peut-on parler de cité d’ailleurs ? Elle n’existe que parce que je suis encore en vie. Pendant près de mille ans, je me suis sacrifiée pour tous ces êtres. Pendant que toi, tu pouvais courir dans les vertes prairies, manger mes fruits, contempler mon paysage depuis le haut de l’unique montagne, où se trouve ce temple. Et ai-je eu un seul retour en gage de gratitude ? A-t-on eu l’idée de me remercier parfois pour ce que j’ai créé ? Et bien regarde simplement l’état de cette pièce : peu éclairée, poussiéreuse et étroite. Personne n’a pensé que j’aurai besoin d’espace ? Jamais quelqu’un n’a porté d’amour à mon égard. »
La petite sœur s’élança alors sur son aînée qui allait continuer d’énumérer tous ces malheurs, mais elle se fit rejeter en arrière aussitôt.
« Arrière vautour ! Si je pars en guerre, c’est de ta faute. Si je meurs là-bas c’est la même chose. »
La projetée montra un visage terrorisé. Ses jambes commencèrent à trembler, ses dents à claquer. Quel est encore ce nouveau sentiment ? Après la haine, l’amour, le peur et la douleur, serait-elle en train de découvrir la culpabilité ? Ses yeux se vidèrent de leur dernière once de vie, et elle resta là à fixer Smapha.
« Oui Célélathane, rien de tout ça ne serait arrivée si tu n’avais pas été aussi jeune et si incompétente ce jour-là. L’Exil était un jour de paix pour nous tous, et tu devais t’y rendre pour amener toutes ces créatures ailées, tous tes confrères. Non, ce n’est pas cette cité la fautive puisque je me suis sacrifiée : c’est toi.
- Cesse de jouer les égoïstes ! finit par hurler l’interlocutrice, les yeux remplis de larmes. Pourquoi serait-ce moi la fautive ? Comment veux-tu qu’un jeune enfant puisse gouverner ? Même si cela aurait été le cas, je serais morte bien avant notre époque et tu aurais été choisie de nouveau. »
La jeune fille se relevait en même temps qu’elle parlait. Son regard de souffrance et de colère ne semblait pas du tout toucher la Déesse.
« Et tu dis qu’aucun individu ici n’a songé à toi ? interrogea-t-elle en fermant un de ses poings. Et tes Gardiens, à quoi servaient-ils ? Ne doivent-ils pas te protéger ? Et sache aussi que contrairement à ce que tu pourrais croire, c’est que je t’aime ma sœur. Oui, tu as bien entendu j’aime ma sœur ! hurla-t-elle. Et puisque ton jeu est de rejeter la faute sur les autres, explique-moi pourquoi tu as demandé de me mettre à l’écart des autres ? Pourquoi ne devais-je pas te voir ? Pourquoi n’as-tu jamais été là pour moi ? »
L’aspirante Déesse s’échauffait de plus en plus. Les envoyés semblaient regarder la scène d’un air amusé, tandis que les Ousa restaient impassibles face à ces violentes accusations. Ce règlement de compte familial paraissait également futile à Smapha, qui prit un air dédaigneux avant d’ordonner que l’on amène Célélathane à sa place.
« L’amour ? Que connais-tu de ce sentiment, petite égoïste ? Toi qui aujourd’hui te sacrifies simplement parce que j’ai décidé de me retirer, peux-tu m’expliquer comment tu as pu apprendre un tel sentiment dans ce monde ? Tu as juste trouvé quelqu’un à idolâtrer, et sur qui rejeter la faute. »

Sa partenaire devint alors immobile, et se laissa emporter par Kerrouse et Setonouse. Elle était complètement sidérer par tant de méchanceté. La femme qu’elle voyait tant comme une Déesse sage, bonne, aimable et douce comme l’avait décrite ses Gardiens, cette illusion venait de se briser en mille morceaux tel un miroir sur lequel on aurait frappé trop fort. La sonorité correspondrait au choc, et les bouts de verre à son cœur. L’image utopique cachait un monstre de cruauté et d’égocentrisme. Etait-ce donc cela, sa sœur ? Cette héroïne du peuple qui avait choisi d’elle-même d’être la Déesse de ce monde. Est-ce que le temps aurait déformé la pensée des gens ? Ne nous avait-on pas dit qu’elle connaissait son sort si elle choisissait cette voix, et qu’elle avait décidé ainsi par amour pour cette petite fillette, qui faisait son bonheur ? Cette vision avait tellement attiré la curiosité de Célélathane. Amour ? Qu’est-ce cela ? Se serait-elle finalement trompée de chemin ? Cette blessure, ce sentiment, ce n’était donc pas de l’amour ?

La nouvelle Elue s’était laissée traîner jusqu’à son nouveau trône. Chaque fois qu’elle passait un seuil du cercle magique, Smapha en passait aussi un pour en sortir. Elle attendit sur l’extrémité du cercle, et observa tout le cérémonial pour sacrer la nouvelle divinité.
La jeune fille aux cheveux mi-longs fut assise sur la chaise en bois. Setonouse, l’Ousa de l’eau, prit le sceptre de son ancienne souveraine, s’agenouilla et le montra à sa nouvelle.
« Si tu veux te racheter de tes fautes, dit doucement l’aînée, et prouver que tu aurais pu être à ma place il y a mille ans, accepte ton destin en temps que Déesse d’Ethoselea, l’astre divin. Les Ousa seront tes serviteurs. Ils n’ont qu’un seul but, te protéger et te servir aveuglément. Tu es maître de leur vie, et ils ne peuvent te trahir sous peine de porter le poids du banni. Tel a été leur serment. »
Les yeux bleu clair se posèrent sur l’objet offert. Après un petit moment de contemplation, elle posa sa main et le prit.
C’est alors que la salle se remplit de lumière et dissimula la croissance très rapide de Célélathane. Car en effet, quand tout prit fin, elle en ressortie plus mûre qu’avant. Ses cheveux raides tombaient à présent sur le sol, ses yeux fins étaient à bords tombants et lui donnaient un air de tristesse permanente, sa taille était plus haute que celle de la précédente Déesse. Sa présence devenue imposante et ses pouvoirs décuplés, elle regarda sa prétendue sœur. Cette ignoble créature qui ne voulait prendre aucune responsabilité, qui ne savait pas que s’en prendre à elle-même et qui lui envoyait tant de haine. Sa colère était à son point culminant et était prête à exploser tel un volcan en fusion, quand tout à coup l’autre membre de sa famille se mit à lui faire un sourire tendre et amical.
« J’ai toujours été à tes côtés. Oui. Ce monde où tu as appris ton savoir faire et ton rôle, cette terre que tu as tant foulé et parcouru pour vider ton esprit, cet endroit n’était autre que moi. L’herbe, l’arbre, la feuille, la viande, l’air tous ces éléments ont été créés de par ma volonté pour que notre espèce puisse vivre en paix. Je t’ai toujours vue, protégée et réconfortée quand l’espoir fuyait dans le néant de l’obscurité fatale. »

La Déesse resta figée. Elle ne comprenait plus. Que s’était-il passé ? Est-ce encore une vision ? Ou bien une nouvelle ruse de cet Ange machiavélique ? Elle ne pouvait pas y croire, la gentillesse ne pouvait habiter ce corps !
« Ne m’excuse pas pour ce que je t’ai fait, continua l’autre. J’ai tout mis en œuvre pour ne pas que tu prennes exemple sur moi. Je t’ai rendue confuse, et tel était mon souhait. Je ne veux pas que tu choisisses la même voix pour alimenter ce monde. Tu as encore beaucoup à apprendre pour les sentiments, abstractions que les humains nous ont transmis et dont peu comprennent encore le sens parmi nous. J’ai pu voir que ton cœur n’était pas si renfermé que ça, et que tu as pu avoir des pulsions bien que tu aies vécu à l’écart. »
Le corps de Smapha céda. Un des émissaires du monarque la rattrape avant qu’elle ne touche le sol et la relève. Celle-ci regarda une dernière fois sa cadette. Puis penchant la tête sur le côté, son visage s’éclaircit et d’un air joyeux elle dit à sa sœur par télépathie : « Je t’aime aussi ma chère et tendre petite sœur. Pardon d’avoir été violente. Je te le répète : ne fais pas comme moi, ou tu deviendras folle comme moi à l’instant. Je te demande de m’excuser, mais ne le fait pas. C’est ma dernière volonté. »
Les messagers prirent la demi-inerte sur leurs épaules et la transportèrent vers le palais. Quand la porte se referma, le claquement hurla dans la pièce presque vide. Plus personne ne bougeait, rien ne se passait, tout restait comme glacé.

Au plafond, des fleurs blanches arrivaient par l’entrée de la lumière du soleil. Leur cœur était à la fois rosé et jaunit. Leur tige verte et entortillée les faisait entrer dans la pièce. Des pétales en tombèrent. Ils chutaient tout en entamant une longue danse, accompagnant le carillon de la Mort, qui retentissait de nouveau. Célélathane crut y voir la parade du Destin. Chacune s’élançait dans le vide et descendaient plus ou moins rapidement. Mais toutes arrivaient à la même destination : le sol où tout pouvait être écrasé facilement.
La divinité de la pièce comprit que peu importe si nous étions des Anges ou des Anciens Anges, tous finissent par mourir un jour. Chacun doit partir, mais plus ou moins lentement. Cette immortalité est un cadeau empoisonné, où les Elus en souffrent le plus. Le venin brûle leur vie, mais elle est quasiment éternelle.
Les larmes surgirent de nouveau à la vue de ces fleurs, mais plus aucune émotion de crispa son visage. Célélathane priait déjà pour la ville qui a bercé ses journées si importante. Elle se rendait compte à quel point chaque jour avait compté dans son existence.

Malgré sa nouvelle fonction, elle donna ordre de faire pousser ces fleurs un peu partout dans le royaume et de les baptiser Phletamos, en mémoire du sacrifice de Smapha et de la souffrance de ses deux sœurs. Ces deux Déesses étaient souvent comparées à de magnifiques jeunes femmes en fleur à cause de leur fragilité et de la beauté.
Jamais elle ne demanda des nouvelles du prédécesseur. Elle ne voulait pas savoir ce qui avait causé sa mort, et tenait à faire honneur à la promesse faite auparavant.
Avec le temps, elle formera une deuxième garde formant les Kaphithoses [4]. Les éléments secondaires viendront prendre place.

En Thoségota, Phletamos signifie Larme de fleur.

[1] Il faut savoir qu’à cette époque, un monarque gouvernait cette terre. Célélathane le détrônera plus tard lors d’une révolte. Elle mit en place ensuite un autre système administratif, et agrandit la ville pour la développer. Pour éviter de devenir folle comme sa sœur, elle décida qu’on lui rende un culte pour prouver sa reconnaissance. Les Kojithos [2] devinrent plus rares car il fallait croire en elle, ou en des valeurs qui pouvaient rivaliser. Les Sanathos [3] qui avaient été mis en retrait purent prouver leur valeur grâce à leurs découvertes scientifiques.

[2] « Ange blanc » -> Ange de mythe
[3] « Ange noir » -> Ange de la réalité
[4] « Ange gardien »
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